{Le soleil est encore pâle et timide, mais il observait déjà la ville qui s’étendait sous lui. Il avait coutume de sortir sur la terrasse à l’aube, parfois même un peu en avance sur le soleil. Il pensait à ses fils, à ses petits-fils et à ses héritiers, qui viendraient peut-être d’Espagne ou de Grèce, d’Afrique ou du Danube, des Îles du Nord ou de la Galatie. La ville était encore calme à cette heure, mais il est vrai qu’elle était longue et lente, depuis l’Afrique jusqu’à la Galatie, depuis l’Espagne jusqu’au Danube. Il notait quelques idées à l’aube et disait que celles-ci trouvaient leur source dans l’aurore. La journée serait longue comme une vie. Et demain elle recommencerait. En Galatie. En Espagne. Et même dans Syracuse, la plus grande cité Grecque, qu’il s’apprêtait à quitter pour affronter ce qui maintenant avait revêtu les pannes du jour.}
Le fragment 77 du manuscrit dit “Sépyre IV„ est le fragment le plus ancien que nous ayons en notre possession. Il est remarquable que ce qui y est décrit nous soit parvenu dans son intégrité. Malgré cela, il est très difficile de dater les évènements décrits. Le mot de Syracuse (Urbem Syracusas maximam esse Graecarum) peut évoquer aussi bien un séjour ancien que plus tardif, une visite militaire ou une halte sur une route inconnue. Sur la foi de quelques éléments discrets, un mot, un signe d’un autre fragment, certains exégètes évoquent la date de -99 av. J.-C., où l’empereur aurait profité d’une expédition paramilitaire pour faire escale dans la ville et y rencontrer les premières associations de chrétiens ; certaines sources douteuses et farfelues évoque la rencontre avec saint Paul lui-même, mais les dates ne coïncident pas (à la mort d’Auguste, saint Paul aurait une dizaine d’années) ; il n’est pas exclu néanmoins que l’empereur ait pu rencontrer certains païens qui allaient jouer un rôle important dans la diffusion du christianisme dans les décennies à venir.
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