Comme Pierre Ménard, je greffe directement sur le site ma proposition à l’atelier d’écriture du jour de François Bon (à Ouessant, dans le cadre de Numér’île). Je ne sais pas si j’ai bien lu les consignes, mais j’ai aimé l’idée et je me suis lancé, sans doute là la limite : je me suis lancé à la mer, dedans : pas vraiment fait face. (Seule consigne donnée en plus, écrire vite !)
Face la mer Rimini et le carré est déjà là du vide encapsulé.
Face à la mer Genova qui sait ce qu’ils ont cherché à faire ceux qui agglutinent quelques planches de bois un carré de tissu, pêcher tu parles, ceux de Ligurie qui montrent comment naviguer à ceux de Rome même, ces paysans les pieds dans leur mélasse, nous c’est envie de voir plus loin tu sais, un jour peut-être on aura tout ça pour nous, dans la poche, on se dit ça — en voyant ça, je se dis ça, depuis ma rive, d’ä mæ riva.
Face à la mer Lacanau parce que la mer est partout et toujours plus loin tu t’enfonces voilà bien vingt minutes cent minutes que tu patines que tu t’agites face à la rive je ne vois plus même les petits bonshommes qui sait s’ils me voient eux, face à la mer c’est continu, ligne perpétuelle, ils avaient inventé la perspective j’invente le face-à-la-mer toujours et la tête dedans la tête dessous face à la mer mais c’est partout et devant et derrière aussi et dessous et dessus, retourné, roulé, la mer c’est l’espace qui implose, c’est pas euclidien la mer, c’est pas carré, mais je me rappelle bien que là face à la mer ce n’est pas ça que je me dis je me dis c’est toujours la mer c’est encore la mer la mer la mer je me noie.
Face à la mer encore l’italienne depuis le rocher cette fois pas la plage et face à la mer pourquoi s’y jeter vouloir traverser la petite crique les vagues déchaînées et si mal mesurer la distance ou le courant ou le ciel qui pétille dessus, des rochers des écueils partout il faut nager puis sauter puis nager puis s’agripper je ne connais pas ça cette mer ce silence par contre est toujours le même pourquoi face tu plonges dans le carré d’eau peut-être ça l’erreur.
Face à la mer les rêves s’estompent ; tout ce bleu tout ce mauve tout ce gris, toutes ces couleurs tout le temps, toutes ces vagues qui sont précipités de la couleur c’est très cruel la mer son appétit est permanent c’est insatiable la mer la cruauté c’est l’insatiable le malheur c’est de ne pas de ne jamais oublier alors face à la mer revenir à l’enfant qui marchait comme un bernard-l’hermite on le fait bien ça le bernard-l’hermite on le maîtrise c’est une nage qu’on maîtrise avec ses membres raides et boitant et soufflant c’est ça la face de la mer un pagure qui ruisselle et claudique un univers qui clabote et face à la mer on ne voit plus — les larmes.