Les sujets ne manquent pas, qui suscitent aussi bien l’indignation que l’affliction. Ils n’ont sans doute jamais manqué. Et sans vouloir éclairer trop lourdement l’époque, on note tout de même une nette dégradation du crédit réciproque que chacun devrait donner au groupe auquel il appartient.
On est tout à fait étonné de noter à quel degré d’aveuglement et de surdité est arrivé le gouvernement. Dans un lointaine chronique polémique, j’avais déjà parlé d’aveuglement à propos du PS, mais de la part de ses défenseurs, voire de ses électeurs (on me dit qu’il y en a). C’est plus simple (bête ?) ici : l’aveuglement et la surdité est celle des dirigeants actuels.
C’est dire qu’ils sont pour la plus grande part d’entre eux totalement déconnectés non seulement de la vie réelle — cela on le savait déjà, et depuis longtemps — mais totalement décomplexés quant à leur fonction, à ce qu’ils représentent, et donc quant à la démocratie.
La manière dont la réforme des retraites a été menée est d’une inédite violence politique. Je ne me rappelle pas d’un tel mépris à la fois de la rue (et non pas la rue d’un parti, mais celle de toute une nation) et de la chambre (certes, pas des plus exemplaires), le tout au nom d’une espèce de mission que le gouvernement et le président auraient, mystique dégradée qui est en réalité un programme de destruction massive de l’Etat et, avec lui, de la politique. En toute tranquillité. C’est-à-dire avec la méthode éprouvée de la pensée magique.
Ainsi le symbole du 49.3 vient-il terminer le travail de désagrégation totale de la confiance, et de par le fait, de la violence sociale qui e découle.
Le parallèle est sans doute malvenu, mais on ne saurait sous-estimer que la dégradation du dialogue, que cet aveuglement et cette surdité imposent, conduisent, qu’on le veuille ou non, à la violence, qu’il s’agisse d’une révolte ou qu’il s’agisse d’une guerre.