Echo, voix scintillante, mais fissurée, changeante et désormais par retour transformée.
Echo, de ce qui est devenu moins qu’un nom, moins q’un logotype ou une marque déposée, justement parfois les noms (prénom + nom) accolés et en minuscules, à la manière des adresses électroniques, pour réduire encore de l’individu la part.
Car l’individu à sa part obscure. Jusqu’au fond de l’être, chercher à se défaire, se départir, se déchirer, de tout ce qu’on est, pour ne devenir que ce qu’on rêve d’être.
Alimenté par les douleurs et larmes de l’enfance, comme seul étai pour se détourner du vide, il incarne ce qu’il rejette et n’aura plus de cesse de quitter le corps, le symbole et l’objet que son destin aura forgé de lui.
[…] ma face s’allonge, ma bouche se fend, mes narines s’écartent, et mes lèvres deviennent pendantes ; mes oreilles se dressent dans une proportion démesurée. C’est l’attrait de la métamorphose, chère aux anciens, qui s’est emparé de lui, fruit de son pygmalion de père.
Ni adulte ni enfant, ni homme ni femme, ni noir ni blanc, il va s’échiner à creuser de lui tout ce qui fait une identité et c’est le tragique de sa vie : comme évider ce que l’être qui le répugne sans toucher à l’être même.
Il est de ces destins que la gloire étreint, et étouffe, au détriment de la personne, de l’homme, jusqu’au fond de l’ignominie.
Imago, c’est le nom qu’on donne aux insectes adultes, c’est le mot français image. Persona, c’est en latin le masque. Persona, imago, sont les deux faces d’une même ambivalence. Un état transitoire entre son être intime et inétrieur, et son simple rôle, son habit, dans la vie civile ou sociale.
Je ne suis pas certain de retenir ce qu’on retient de lui habituellement, sinon sur la danse, sur laquelle il a imposé une touche évidente. Musicalement à la traîne de la mode, cédant aux facilités des immenses concerts propres aux années quatre-vingt, qui ont tant fait du mal à la musique et au concert lui-même, il convient toutefois d’observer simplement ses talents de paroliers. En observant les milliers de témoignages vidéo qui abondent internet, on exhume, c’est le ca de le dire, la version longue de Thriller. Outre les paillettes obsolètes de l’époque, ce qui frappe c’est la mise en abyme, le fil dans le film. Métamorphose. And though you fight to stay alive / Your body starts to shiver / For no mere mortal can resist , The evil of the thriller. Dans Billie jean, la même mise en abyme, de la fiction dans le réel, et réciproquement : Billie jean is not my lover / Shes just a girl who claims that I am the one / But the kid is not my son / She says I am the one, but the kid is not my son.
The kid is not my son. L’enfant n’est-il pas au contraire le fils, lui-même, déniant toute responsabilité de père, celui dont on dit qu’il est atteint du syndrome de Peter Pan, l’enfant qui refuse de grandir ?
Alors au final on retiendra surtout que ces personnages, qui se veulent comme tels, manipulés jusqu’au bout (qui me fera croire qu’il n’y a pas une armée de requins derrière le grand retour prévu ? qui me fera croire que celui qui possède les droits des Beatles (!) ne peut plus gérer son patrimoine sainement ?), cèdent à un désir mal justifié, mal assumé, mal encadré. Et malgré toutes les qualités, le simple fait, selon moi indigne d’un humain, de se blanchir la peau, de quitter ce nez, symbole de la négritude, de l’esclavage et de tout ce qu’on refuse comme bête de scène (au sens de monstre de foire – le talentueux gamin des Jackson 5) suffit à révéler que sa course tragique vers l’enfer n’a été qu’essentiellement vaine.
Addendum du 3 juillet. En organisant la discothèque pour trier un peu, je réécoute Frank Zappa. Et dans Broadway the hardway, je réentends la chanson Why don’t you like me ?, dont l’ironie est saignante. En voici les paroles. Nul doute que le génie de Zappa aura eu plus de répercutions sur le monde, et je n’y vois pas d’animosité. La question étant bel et bien : And he thinks he looks good to you…
« He’s white, Jim… »
Why don’t you like me ?
Why don’t you like me ?
Am I really that bad ?
HE’S BAD, HE’S BAD
HE’S BAD, HE’S BAD« I thing you’re a jerk ! I’m moving from you ! »
« Make me a sandwich »
« I’m moving back to Venice »
« I’ll be black »
« He’s still white, Jim… »I hate my mother
I hate my father
I hate my sister
And Germaine is a negro!
A NEGRO! A NEGRO!
A NEGRO! A NEGRO!« I thought he looked good — what happened to you ? »
« Please read this pamphlet
« I’m so BAD !You take the monkey, I’ll take the llama,
We’ll have a party : get me a Pepsi —
Michael is Janet, Janet is Michael —
I’m so confused now —
Who is Diana?He’s oxygenated
His nose is deflated
And he thinks he looks good to you
And he thinks he looks good to you