Aujourd’hui la mer est moi.
Ma maman est née le 23 juin. Elle adorait, comme un dieu, la mer.
La mer est un dieu. La mer n’est pas une déesse.
La mer est séduisant.
La mer est moqueur.
La mer est injuste.
La mer est beau, beau comme la mer.
Le 23 juin, je vais dans ce petit bar, à peine une paillote améliorée, étonnant d’ailleurs qu’il n’ait pas encore été chassé par les autorités, toujours plus limières.
J’y allais avec ma maman jusqu’à tant qu’elle pouvait se déplacer, c’est-à-dire jusqu’à ses plus de 90. Quand la grosse Ezia m’a vu, elle a compris – elle avait une mémoire sérielle, un peu comme un agenda.
Elle n’avait rien préparé, mais ce n’était pas un problème. Il lui fallait deux secondes de ses mains expertes pour élaboré la meilleure salade de poulpe de la côte tyrrhénienne. C’était ce que ma maman préférait. Avec un premier verre de blanc, légèrement pétillant, et très clair, très sec. Et un deuxième comme dessert. Sur la terrasse (vu le temps, elle était vide), devant la plage libre et surtout devant son dieu la mer.
Tout était bleu, je veux dire de ce bleu de gris qui bave du ciel à la terre et réciproquement, mer incluse.
La tempête couvait, et j’aimais ce temps, il faisait doux, presque chaud, malgré le vent.
On était bien, la grosse Ezia, le fantôme de ma maman, et moi.