Ce texte [Acte 1, scène IX], appartient à De par la ville de par le monde, un roman en cours d’écriture, en six actes et soixante-douze scènes, qui traite de la figure d’Auguste dans l’Empire romain et au-delà, sporadiquement mis en ligne ici… et exposé là.
Atia possède la maison et y règne en dictatrice.
La chambre d’Octave, elle y fourre toujours son nez, et ses mains. Elle envoie toujours quelque esclave nettoyer, ordonner, dissimuler, perdre. Quand ce n’est pas elle directement.
Octave ne veut pas d’elle. Cette chambre est son domaine. Ces altercations feront la renommé de la maison dans le voisinage. Les éclats de voix et les bruits de vaisselle brisée y sont célèbres, et pris en dérision. Une mère seule avec un adolescent qui ne semble pas pouvoir choisir sa destinée, voilà le triste tableau, le tableau tellement commun, que livrent les Thurinus dans le quartier.
On disait que les Pénates avaient déserté la maison, du fait du fracas perpétuel [LAV 9.1].
Des années plus tard Auguste se souviendra des sempiternelles remontrances et engueulades. Il écrivit un poème, dont se moqua beaucoup Quintus Salvidienus Rufus, ce qui faisait rougir et Octave et Marc, chacun remué pour une obscure raison jusqu’aux tréfonds.
Ce poème est dans Appien, III, 11-19bis :
« Enfant, je capturai un lare
je le mis nu, le liai fermément à quleuqe tripalium,
et commençai à le torturer
La voix des lares est plus sonores
que mille buccins énervés
que mille trompes enragées
et les fresques de mon misérable cagibi
se fissurèrent’
Je n’avais pas le choix
le faire taire »
A puero ut caperent me larum
Ego nudum tripalium
firmiter haerent aliquo,
torqueri coepit
Sonoris vocis Laribus
vocem bucinae iratus milia
mille rabidi tubulis
frescoesque mei miseri cellulae
conterant
Nihil optio :
tacendus illud
Des années plus tard, on voit Caligula, sorti seul, déguisé, sans garde, dans les rues de la basse Rome, observer son peuple. S’il est venu espionner ce qu’il est dit de lui, il constate bien vite qu’il n’est pas du tout un sujet de conversation, triste impression soulignée par le fait que sa personne passe totalement inaperçue. Il écrit dans son journal (LAV 10.3) : « J’ai rêvé cette nuit que la ville était envahie de lares ; chacun reprenant son droit ancestral s’emparait de l’esprit d’une ombre d’une silhouette (ombrae lemuris formaequee) et, comme un troupeaux de pécores avinées, les propulsait vers les falaises les plus raides […] le gardien domestique libéra la maison […] »
Pline dans son Histoire naturelle parle de ces mollusques, « vers testacés géants » de certaines îles des mers du sud, dont les cornes présentent un drôle de panaris arc-en-ciel (ridiculam paronychia caelum irideum) ; selon les gens de ces îles, rapporte Pline, ces vers sont infectés de vers plus petits qui prennent le contrôle de la bete et les mène, par en-dedans (ab into), comme un cheval par la rêne et l’éperon, où bon leur semble. Il dit qu’un phénomène semblable a été rapporté des forêts de l’au-delà du monde, avec des fourmis commandées par des spores (formicae farris motu sporis).
« C’est ce qu’est la ville aujourd’hui, finit l’empereur, le vin est monté trop de têtes (ascenderunt multi principes uinum). Les prostituées sont prises par des géants velus, des monstres androgynes pourchassent des matrones et, dans un bouge, un homme arrache les dents de bêtes inconnues pour les fourrer dans des farces aux odeurs fétides (in agente adnexarum inculcare lascivia putores)… »