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14. Sciences naturelles
« à la manière de Manuela Draeger… »
Liste des herbes qui réchauffent
la discrète du boudu
l’épanouie
le digitaire
la fileuse du marcheur
le sarcore
la velue métissée
la dressée
la sarcomille
la pendue étoilée
la vineuse
l’escourbi
le généré
le généré soucieux
la ribacelle
le lifouet
la lifouette
le garganara
la cicodu
la livette pressée
le cécador
le miflu
le lycaon pentu
le dordémort
le sagace
la suge farcie
la joue d’hercule
le petit-pas
l’élancette
le géson du rocher
l’espézette
la bombée
la bombée ramifiée
la bombée étoilée
le zitou
le berceur de ces dames
le déligné
la claudette
le fourbu-minuit
le bourreau piqueté
la lichue
le clair-obscur
l’herbe aux moines
la tendue des rosées
l’amourette
le bleuet du Japon
l’amas réticulé
Liste des herbes qui scintillent sous la lune
le bombyx vinotaire
la perdue
le linotier
le vermillon pucier
l’ataneur
le lycasse
le brindillé joufflu
l’arpenteur des écoles
la plumine
la plumine engouffrée
le baiser d’Adam
le sinissieux
la rouge épaisse
les ciseaux d’Auguste
le colli
le verselé
la limace du Bon Dieu
la longe vétilleuse
le vernis du pécheur
le spiralé africain
le bozon déluré
la crivine à rayures
la civette à bonnet
le pied de cochon
la coque amarante
le limier charnu
la sébille clarifiée
le dard de l’apiculteur
l’effeuillée
ED
Pedibus fraxit
Ses graines sont transportées par le vent, ou par l’eau.
Elles se logent entre les racines de certains érables pendant l’hiver.
En avril leur croissance extrêmement rapide commence par briser les racines.
quand les feuilles se développent elle tourne une langue rose vers le ciel et dissuade les oiseaux de faire leur nid.
Leurs fleurs, grises et à l’odeur nauséabonde, éloigne les amoureux.
JNC
15. Nostalgérie
Quand je viens, pour la première fois, habiter dans cette maison de famille, les poignées des portes m’arrivent juste au niveau des yeux.
Je mets longtemps à toutes les découvrir car la maison est très vaste.
Il y a celles en bois tourné, qui vont du vulgaire sapin à l’ébène en passant par l’acajou.
Il y a toute la famille de celles en porcelaine, sphériques ou ovales, qui sont très douces au creux de la main.
Il y a les becs-de-cane, de toutes formes, de tous styles et de toutes matières.
Il y a les mécanismes très sophistiqués, avec anneaux et chaines en fer forgé, dont la manœuvre se refuse souvent aux petites mains des enfants.
JNC
16. Arriver en étranger
Je gare la voiture devant l’église, traverse la route et pousse la porte de la petite épicerie.
Une clochette , accrochée au plafond, tinte pour prévenir de l’entrée d’un client.
J’approche de la banque peinte en gris avec la balance et les poids en laiton… bien sur…elle me l’avait décrit.
Au fond du magasin une grande fenêtre donne sur la rivière… terrain de leurs jeux d’enfants.
Dans la vitrine, les bocaux en verre, remplis de bonbons réapparaissent…
J’achète un pain et un kilo de pommes et je ressors.
Juste à coté, il y a la porte du garage où il garait la camionnette avec laquelle il faisait sa tournée dans les villages environnants.
JNC
Après la grille ouvragée,
je traverse le parc bien ordonné.
Bâtisse imposante de briques rouges aux cheminées élancées.
Les volets sont ouverts.
Frémissement intérieur.
Trois marches au perron.
Sur la porte, une main cuivrée.
Je lui fais battre le bois.
Silence qui s’entr’ouvre.
Mon corps passe.
Escaliers doubles, boiseries, tapisseries florales, stucs.
Dans un salon, une table vernie et ses chaises à hauts dossiers
posées sur un tapis comme un jardin.
Pièce à l’allure aigre-douce.
Air frais inattendu
Une détonation
ma tête vacille
je lis la courbure des piètements assemblés
les motifs du tapis se rapprochent
me percutent
m’absorbent
couchée dans ce jardin
une dalle de pierre
ED
ENFANT JE N’AI PAS VU
Condat, jeune géante allongée sur le sable, mamelons dressés vers le ciel, jambes ouvertes inventant la confluence de deux rivières où abondent des nuées de libellules multicolores.
ENFANT JE N’AI PAS VU
le Tacon entaillant l’anticlinal des hautes Combes avant de rejoindre la Bienne à Saint-Claude, contournant sur son chemin le Mont Chabot et le Crêt du Surmontant.
ENFANT JE N’AI PAS VU
en amont de Morez, aux lieu-dit Les Rivières, la source de la Bienne se gorger des eaux souterraines de la Biennette et du Bief de la Chaille.
ENFANT JE N’AI PAS VU
sur le clocher des Rousses, les pluies s’écouler du toit oriental pour s’en aller grossir la rivière d’Orbe jusqu’au Rhin et les pluies du versant occidental, descendre vers la Bienne, jusqu’au Rhône.
ENFANT JE N’AI PAS VU
La Bienne sauvage se frayer un passage dans les plissements profonds du massif du Jura
ENFANT JE N’AI PAS VU
au petit barrage du pont de Roche blanche, à proximité des échelles à poissons, les garçons attraper à la main des truites luisantes et dodues.
ENFANT JE N’AI PAS VU
La seconde chute d’eau du ruisseau de Pissevieille, après le petit pont de pierre au-dessus du bassin tapissé de mousses luxuriantes et creusé par la première chute d’eau, en surplomb de l’usine hydro-électrique adossée à la falaise de calcaire, dans un méandre de la Bienne.
ENFANT JE N’AI PAS VU
Au pont de Noire Combe, hameau de Cinquétral, les femmes descendre à travers bois, leurs grandes corbeilles d’osier chargées de tuyaux de pipes que d’autres femmes poliront ensuite grâce à la force motrice.
ENFANT JE N’AI PAS VU
Sous le viaduc de Valfin, à mi-distance de la ligne de chemin de fer entre Saint-Claude-Morez, le récif coralien vieux de 140 millions d’années comparable à la grande barrière d’Australie.
ENFANT JE N’AI PAS VU
le Jura recouvert par une mer tiède et la formation de calcaire oolithique constamment battu par les vagues
ENFANT JE N’AI PAS VU
des colonies de coraux se développer pour favoriser la construction d’un large récif
ENFANT JE N’AI PAS VU
la flore et la faune proliférer.
Tout est cousu d’avance
la mer remontera le fleuve
ENFANT J’AI VU
Le belvédère de Cinquétral
Les Infirmeries
Le petit Bouchat
Le grand Bouchat
La vie des ri
Le côtaron
Le merderet
Sur les Arrêtes
La fontaine des yeux
Les Vennes
Le Bourgeat
Le Bugnon
La blénière
Le Moranti
Le Freinois
La main Morte
Le crêt pourri
Vaucluse
La safranière
Le pas d’Ane
Tré la Roche
Sous le Gyps
En Pissard
Sur les Raisses
La Pelaisse
La Combe de Servagnat
Sur la couronne
La grotte des sarrazins
Noire Combe
Roche blanche
La cascade de Pissevielle
MC
Sifflement Grincement Gémissement.
Petite, elle se cramponne au cuir élimé de la banquette d’un vert fané.
Sifflement Grincement Gémissement.
Sa main actionne maladroitement la poignée de la vitre. Elle se hisse jusqu’à l’ouverture de la fenêtre, le regard tendu vers le vert des prés
Le vert des prés de l’été.
Sifflement Grincement Gémissement.
L’autorail de Lyon entre en gare de Saint-Claude.
Sifflement Grincement Gémissement.
L’enfant a grandi, a parcouru le Nord, découvert le rire des inuit dans les ricochets de la vie et le blanc de la neige.
Le blanc de la neige en hiver.
Sifflement Grincement Gémissement.
Aujourd’hui elle habite le lieu de l’enfance qu’elle a peuplé de ses rêves.
Le Nord est derrière elle, la vraie vie au-dedans, là où se puise et s’épuise la force du désir, celui d’être ici et maintenant dans le temps sidéral
Sifflement Grincement Gémissement.
L’enfant a rejoint son lieu naturel et comprend qu’elle est un fragment d’éternité.
MC