Chaque texte le dernier, comme si se fut inscrit, comme un paraphe dormant, sous chacune de ses failles, au pied, le précepte faussé. Je n’écrirai plus. Comme si, roulant sur la marge, comme un feston de silence, abasourdi ou inquiet, le texte portait en lui le jaillissement de sa limite, entendue comme gouffre pariétal, là…
Auteur/autrice : Benoît Vincent
Le premier cri
Comme chaque nouvelle saison, le poète natal, bu jusqu’à la lie, recrache dans l’air devenant bleu – mais bleu pas encore tout à fait – ce cri mémoire, ce cri brèche, ce cri déchirure et anxieux ! Le martinet noir est revenu, dans sa toge de deuil, il ramasse nos espoirs étourdis, alors qu’à présent…
L’eau est froide
L’eau est froide quand « tu la rentres », c’est un mur transparent ou bleu turquoise, selon. La roche grise, les cailloux blancs de Lez t’éclaboussent tout autant. Mais c’est en pensant à la yeuse qui surplombe (tu disais toi-même qu’avec ses deux racines dans le vide « elle avançait ») que tu te laisses prendre par le courant…
Le voile
Il semble que l’œuvre soit comme un drap froissé, jeté sur un relief quelconque – mince pellicule. Les points les plus hauts (les à-pics les plus vertigineux), épineux le déchirent : ils portent les noms des influences plus grandes, des noms les plus lus, les plus écrits. Nous confrontons nos sources, mais nos sources nous…
Engramme
Non pas programme, qui ne rime à rien, mais Engramme qui rime pourtant. Un engramme pour des chantiers futurs ? C’est grâce à l’écologie. L’écologie nous a amené cela : qu’on développe une pensée réticulée, une pensée, une philosophie, des rapports sociaux de réseau. Ce qui importe de développer actuellement, sur la cartographie de nos…
Traîne lasse
On a sauté le fil sensible des âges. On a regretté venir. On a pleuré aussi. On a ri. Elle, étale, choisissait les nuages. L’autre, en est venu(e) aux mains. Les livres témoins impossibles aux écornures enflées, non. Les chiens halètent ou aboient, selon l’humeur de la lumière. L’écho désigne le vide, le souligne, le…
Jalousie
Le chas d’une aiguille… un tissu laissé au vent, un genre de flanelle ou de crêpe. Un pantalon en lin. Une ligne sépare les arbres, comme des camélias, du ciel, qui se couche bas. Puis une chose très formelle, comme l’œil d’une caméra… la pluie… et quelque part Jérôme Lindon veille. Astuce et malice, glissées…
Liseuses
Je sais que tu n’es pas là, alors, qui lira cela ? A quoi sert-il d’écrire sans liseuse ? A quoi sert-il d’ajouter des pages au grand livre déjà trop plein d’hier ? Quelle habileté à jeter la ligne ! Mais après, combien d’aléas, dans l’écume du courant, au travers des vagues puis des pierres,…
Les presque-morts (lettre à S.) (hommage à L.)
[…] Je crois qu’en résumé, tu es mort, et tu ne le sais pas. Le travail, la télévision, l’ambiance générale, ont patiemment accompli leur œuvre ; le sport, l’argent, le sexe, lentement, ont taraudé le muscle même de ton âme : tu es mort, tu ne le savais même pas. Qui pourrait te le dire,…
Nœuds 1
Je suis venu pour te voir. Mais j’ai changé d’avis. Je ne viendrai pas. Cette intention s’est éteinte. En effet, je me demande : je ne te connais pas ; pourquoi te déranger ? Je ne peux même pas regretter que tu nous ai quittés : puisque tu n’étais jamais vraiment là. Et qu’est-ce que…