Je terminais un précédent texte sur l’étonnement, l’étonnement qu’à considérer (sic) en quelque sorte à égale distance (sic) tous les chantiers en cours, d’a priori imperceptibles fils les reliaient ; a première vue, c’était une espèce d’anastomose : les chantiers contemporains se chevauchaient, et certains bavaient sur d’autres, manquaient leur singularité, et ce constat me navrait.
Pourtant ils n’en étaient pas dénués, de personnalité ! Je répète la liste : Bobines, donc, Vorace, Conversation générale et Archivive, et je répète leur… « condition » (?), à savoir respectivement l’usine de Dieulefit, la Méditerranée comme métaphore de l’herméneutique, l’idiome et le tropisme psychiatriques et la mémoire du vivant…
Puis je réalisais, à travers les évènements qui émaillent la progression de chacun, que ce n’est pas une anastomose, non, mais plutôt les fils (déjà multiples de brins) d’un même tissu, et quand je vois les termes de ces « conditions » ci-dessus, j’y vois précisément une autogéographie.
Ce n’était pas du végétal à l’œuvre (ou du cancer, ce qui n’est pas réjouissant), mais plutôt le patient ouvrage de l’araignée, cette toile qui agit comme une machine photographique.
Hier soir, pour distraire la sciatique, je marchais le long de la route, et croisai la toile au centre de laquelle veillait l’épeire diadème, et la photographiai longuement, tout en lui parlant. Et je me suis fait cette remarque : mais Laragne, Laragne où nous participons à cette Conversation générale, à deux pas de la Drôme et par ricochet, de l’usine… à deux pas des terres de Giono (et donc de Panitza, mais aussi de toute la clef de Farigoule à Féroce — et donc Vorace), et cette concomitance avec la présence, pratiquement ubiquiste, à Saint-Germain-la-Blanche-Herbe1, Laragne, ne serait-ce pas cette araignée tisseuse (italien ragno, occitan local aranha), modeste parque qui poursuit son irrésistible (quoique très cassant) travail, depuis l’usine de moulinage jusqu’aux liens de Paolo Milone.
Je pensais ça, sans rire, benoîtement (je sais faire, je peux en parler), mais je constatai peu après que Laragne vient précisément l’auberge voisine d’une relais de poste, L’Aragne, qui lui donna son nom au moins au XV-XVIe s !
Je me permets ce détour ici (une espèce de nœud) parce que j’ai le sentiment que la partie introductive de Bobines touche à sa fin. Le lecteur connaît le contexte, à présent. Il me faut maintenant initier ce que Michel Woelfflé appelle ma quête. Il faut que je retrouve non pas mes (ou l’un de mes) parents, comme Michel, ni mes enfants, comme Arthur, mais les habitants de ce territoire qui est devenu littéralement (au sens d’Augustin Berque) mon monde : maisusine.
- Laragne d’où part d’ailleurs la com de Féroce, par le hasard et le truchement de Julien Bénard, le photographe également en résidence avec Yoma, artiste peintre amie de Luc Garraud ! ↩