Lettre de Lancelot du Lac, chevalier blanc, chevalier solitaire, premier ministre du royaume de Logres, à Arthur, roi de Logres et de Bretagne

Les premiers jours de novembre, feuilles et baies à terre

Mon roi,

Vous connaissez le respect dont j’ai fait preuve à votre égard, depuis notre première rencontre, et jusqu’à notre dernière entrevue. Je ne crois pas vous avoir trompé quant aux motivations qui nourrirent ma tâche à vos côtés… Notre tâche devrais-je dire, à moins que nos regards divergeassent. Ne visiez-vous point l’horizon de Logres ? Ne rêviez-vous point à la farandole retrouvée sur les chemins de Bretagne, de l’Aquitaine à l’Orcanie ? En somme ne souhaitiez-vous pas de tout votre cœur l’ordre et la sécurité des personnes comme des biens ?

Je vous aurais suivi jusqu’à la mort, mon bon roi, si vous aviez suivi votre règle et rigueur, la même règle et la même rigueur que vous enseignâtes, que vous commandâtes !

Je vous aurais suivi jusque sur les Montagnes infranchissables, par-delà les Océans tumultueux, jusqu’en Atlantide, en Vallon et au-delà même des Enfers, tel votre Eurydice, tel mon Orphée !

Mais vous en décidâtes autrement. Votre table ronde, comme la terre, et plate comme elle, vous refusâtes de la renverser. Vous refusâtes, depuis votre position de roi, depuis votre trone, vous refusâtes de devenir un héros.

Je dus sortir, je dus quitter Kamelot. Je regagnai la forêt. Je m’inspirai à la forêt. Je m’ensauvageai. Je doublai bientôt Merlin, notre, votre vénéré druide, et embrassai la cause du loup, puisque le sanglier s’est couché, la gueule dans la main de son maître.

Je suis au regret de vous annoncer mon intention de fonder un clan autonome à partir de ce jour.

Les dieux nous gardent d’une rencontre au sort fortuit.

Avec le respect d’un chef envers un autre chef, d’un roi envers son roi.

Lancelot du Lac

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